Le 15 août, récit d’une ancienne fête nationale

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Louis XIII et Louis XIV entourent la Vierge de pitié «Pieta» dans la cathédrale Notre-Dame de Paris en 2008. ©Marie Thérèse Hébert / Flickr

Aujourd’hui c’est le 15 août ! Nous fêtons donc l’Assomption de la Sainte Vierge Marie (ou sa dormition pour les orientaux), soit sa mort, sa résurrection, sa montée aux cieux et son couronnement. Rien que cela ! Nous célébrons aussi la France car ce jour de l’année fut autrefois celui de notre fête nationale. Pourquoi ? C’est ce que nous allons découvrir aujourd’hui. En espérant que « Notre-Drame de Paris » nous rejoigne l’an prochain pour les festivités de l’Assomption dans un esprit de concorde (ou de fraternité). Je dédie donc ce récit au peuple parisien.

 

AVERTISSEMENT : Le récit que vous vous apprêtez à lire est un ensemble d’éléments constitutifs du roman national français. Ainsi les grandes lignes font directement référence à des éléments historiques quand les éléments de liaison, liés au développement et à la bonne compréhension du récit, ne sont que pure fiction. Pour isoler l’Histoire de l’histoire je vous invite à visionner la vidéo de Gallia (YouTube) sur le Vœu de Louis XIII ainsi qu’à lire le passage dédié dans La Mission divine de la France du marquis de la Franquerie. Bonne lecture et joyeux 15 août.

 

La Donation – Saint Germain en Laye, 28 octobre 1637

Ce jour-là, dans le domaine royal de Saint Germain en Laye, le Roi Louis XIII discutait en présence du Cardinal de Richelieu des guerres à venir contre la population huguenote créant de véritables « Etats dans l’Etat » au sein du Royaume de France. Le Roi était debout au milieu de ce qui semblait être un bureau. Une grande cheminée était présente sur le côté gauche de la pièce, tandis que les autres murs étaient camouflés par de somptueuses bibliothèques. Le Cardinal, lui, était assis dans un large fauteuil de cuir et lisait des documents émanant de ses services d’espionnage tout en caressant l’un de ses chats, allongé sur ses genoux. Une dizaine d’autres chats entouraient la chaise du Cardinal et encore plus d’une dizaine vagabondaient dans la pièce. Ils étaient la propriété du Cardinal en personne. A leur habitude après avoir parlé du sujet d’État en cours, les deux hommes passaient en revue les autres dossiers fâcheux de la monarchie. Le premier et pas des moindres était l’absence d’un héritier au trône de France. En effet, Louis XIII, marié à Anne d’Autriche depuis 1615, n’avait pas réussi à concevoir un enfant. Les grossesses infructueuses de la reine entachaient la vie du souverain jusque-là glorieuse. Militairement, le Roi était imbattable et pour ce qui est du peuple, celui-ci l’avait surnommé « le juste » ; un autre gage de grandeur. Pour autant la fin annoncée du miracle capétien semblait échoir à ce roi pieux. Le divin semble ne pas vouloir lui accorder le miracle de la descendance.

Mais cette situation tragique pour le Royaume de France prit fin en ce jour du 28 octobre de l’an de grâce 1637. Richelieu et Louis XIII parlaient encore du malheur de ne pas avoir de dauphin quand un homme frappa à la porte et entra. C’était un mousquetaire de la garde royale. Celui-ci s’excusa de cette entrée impromptue qui avait éveillé la curiosité du Roi et l’ire du Cardinal. Le mousquetaire dit au Roi :

« – Mon Roi, un homme vient d’entrer au palais. Il dit que c’est d’une extrême urgence. C’est un religieux de l’Église Notre-Dame-des-victoires, un certain Frère Fiacre.

– Faites le entrer » dit le Roi.  Et le mousquetaire s’exécuta.

Le prêtre vint et sans plus de présentation que cela dit au Roi :

« – Votre majesté, veuille m’excuser mais l’affaire est trop importante pour patienter une seconde de plus. Le Reine est Cieux m’a entretenu hier, le 27 octobre 1637, d’un mystère à venir. Votre Majesté n’ayant point de descendance, la Mère du Sauveur veut vous en apporter un à condition que la Reine votre femme fasse donner trois prières de neuvaine dans trois sanctuaires importants de l’âme française. La première doit se dérouler à Cotignac ou la Sainte famille offrit à la France de fabuleuses apparitions. La deuxième doit être faite à Notre-Dame de Paris, cathédrale construite sur la sueur et le sang pieux du peuple français et où vôtre majesté fit installer une lampe à perpétuité pour remercier la Sainte Vierge d’avoir préservé la France des Espagnols. La dernière neuvaine doit s’accomplir en mon église de Notre-Dame-des-victoires que votre Majesté a faite construire à la suite d’un vœu à la Vierge d’édifier une église si celle-ci vous accordait la victoire sur les hérétiques huguenots, ce qu’elle fit. »

Le Roi était dans une joie intense et cela se voyait, Dieu enfin consentait par l’intermédiaire de sa Sainte Mère à offrir à la France le dauphin que tous attendaient ! Le Cardinal, lui, restait sceptique. Il était de ces hommes d’église qui peine à concevoir les miracles avant que l’autorité papale ne les reconnaisse officiellement. Tant de fous, si peu de saints ! Mais qu’importe, le père Fiacre disait vrai, pourquoi ne pas lui donner sa chance ?

Le Roi fit aussitôt appeler la Reine depuis sa résidence du Louvre, lui expliqua la situation et les neuvaines commencèrent bientôt à Cotignac.

 

Notre-Dame-des-victoires, 3 novembre 1637

Alors que les neuvaines continuaient, le père Fiacre eut la divine surprise de voir la Sainte Vierge Marie en compagnie d’un enfant. Le père Fiacre avait déjà entendu des cris d’enfants depuis un moment et voyait ce magnifique enfant qui ne pouvait être selon lui que le Christ. Mais ce n’était pas le Divin Sauveur. La Mère de Dieu prit la parole et dit « N’ayez pas peur, je suis la Mère de Dieu et l’enfant que vous voyez est le dauphin que Dieu veut envoyer à la France ». Les neuvaines reprirent de plus belle dans un élan mystique et d’allégresse. Si Dieu avait promis, Dieu donnera. Le Roi ayant connaissance de cette apparition et de son message soumet un texte de consécration de la France à la Vierge Marie.

 

Royaume de France, 5 décembre 1637

Les prières de neuvaine sont désormais terminées. Le miracle n’est plus entre les mains des hommes mais dans celles de l’autorité éternelle.

 

Palais du Louvre, Février 1638

La Reine reçoit le père Fiacre au Louvre afin de le remercier de l’enfant qui est à naître et qui agite déjà ses entrailles. Anne d’Autriche se met à genoux pour montrer de manière très digne mais aussi  très émouvante son infinie gratitude.

 

Royaume de France, 10 février 1638

En ce jour, le Royaume de France est consacré par édit officiel à la Très Sainte Vierge Marie sur vœu de Louis XIII (le texte prendra dès lors le nom de Vœu de Louis XIII) :

« A ces causes, nous avons déclaré et déclarons que, prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite et défendre avec tant de soin ce royaume contre l’effort de tous ses ennemis, que, soit qu’il souffre le fléau de la guerre, ou jouisse de la paix que nous demandons à Dieu de tous notre cœur, il ne sorte point des voies la grâce qui conduisent à celle de la gloire ».

L’édit prit exécution le 15 août suivant.

Le 5 septembre 1638, neuf mois jour pour jour après la fin des neuvaines (5 décembre 1637), naît Louis Dieudonné de Bourbon, dauphin de France, connu de nos contemporains comme étant le plus glorieux monarque de France, le Roi-Soleil, Louis XIV.

Un maître-autel sera construit en la cathédrale Notre-Dame de Paris pour commémorer ce vœu de Louis XIII sur commande de Louis XIV. Celle-ci représente le Roi offrant à la vierge une couronne (œuvre de Guillaume Coustou).

Les festivités prirent d’autant plus d’ampleur en France tous les 15 août qui devint le jour de la fête nationale jusqu’en 1880. Il est à noter que sous la période napoléonienne, la fête du 15 août devint une fête en l’honneur de Saint-Napoléon ! Depuis 1880, la fête nationale est le 14 juillet et commémore la prise de la Bastille et la fête de la fédération (loi Raspail, 06 juillet 1880).

« Par cet acte magnifique et grandiose, Louis XIII donnait à la reine du Ciel un droit de propriété total et irrévocable, pour le présent et pour l’avenir, sur la France […] C’est pourquoi, qu’on le veuille ou non, la France demeurera, jusqu’à la fin des temps le spécial royaume de Marie » André Lesage, marquis de la Franquerie.

4 thoughts on “Le 15 août, récit d’une ancienne fête nationale

  1. Le 15 août ne peut être la fête nationale française car c’est une fête lié au catholicisme (assomption), or depuis la Réforme tous les Français ne sont pas catholiques.

    1. La totalité de la population français n’est pas catholique depuis bien avant la Réforme (vous oubliez les juifs, les païens,…) pour autant la France n’est pas un pays réformé et eut durant des siècles le 15 août comme fête nationale. Inclure des minorités n’oblige en rien à changer l’identité de la société. Bien cordialement. LDJ

  2. Les Juifs n’avaient pas la nationalité française jusqu’à la Révolution. Quant aux païens ils n’existaient plus.
    Le 15 août est une fête religieuse catholique, la proposer comme fête nationale s’est implicitement faire du catholicisme la seule identité de la France, c’est un refus de la laïcité.
    Choisissons plutôt une fête réunissant tous les Français, par exemple le 17 juillet pour célébrer la victoire de Castillon qui a terminé la guerre de cent ans.

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