Espagne : deux ans après son investiture, quel bilan pour Pedro Sánchez ?

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Le président du gouvernement d’Espagne Pedro Sánchez lors d’une organisée par le Council on Foreign Relations en 2018. ©La Moncloa - Gobierno de España / Flickr

Deux après avoir prêté serment, le président du gouvernement d’Espagne Pedro Sánchez  peine à rassembler. Il vient tout juste d’arracher auprès du Parlement un prolongement de l’état d’alerte jusqu’au 21 juin prochain pour lutter contre le coronavirus. Retour sur son bilan depuis deux ans. 

 

En 2018 le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy est renversé en Espagne. Une motion de censure a été votée par le Parlement espagnol (Cortes Generales) contre son parti, le Parti Populaire, sur fond de corruption interne au groupement politique. Le Parlement met à la tête de l’exécutif espagnol, le 02 juin 2018, le socialiste Pedro Sánchez (PSOE), opposition directe au Parti Populaire. Pedro Sánchez veut montrer une image neuve de l’Espagne avec un gouvernement plus féminisé, aidant les migrants avec l’accueil de l’Aquarius d’SOS Méditerranée et s’inscrivant dans un engagement encore plus profond de l’Espagne vers une fédération européenne rêvée.

 

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Pour autant ses prises de position se révèlent, comme bien souvent, inadaptées et révèlent l’incompétence de politiciens n’ayant pas de vision à long terme. Et lorsque le mur des apparences s’effrite, l’ombre de Franco ne peut que resurgir ; dernière tentative de distraction de l’électeur.

 

Un nouveau monde semblable à l’ancien

La première chose que l’on peut souhaiter d’un gouvernement nouvellement nommé par le Parlement après que le dernier fut écarté pour corruption c’est qu’il ne soit pas lui-même entaché par des scandales financiers. Manque de chance le 13 juin 2018, quelques jours seulement après la prise de pouvoir des socialistes, le Ministre de la Culture et des Sports Màxim Huerta est sommé de partir de son ministère pour avoir été condamné un an plus tôt pour fraude fiscale. Il fut redevable de pas moins de 200 000€ au Trésor public espagnol.

 

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Plus tard, exactement cent jours après la prise de pouvoir de Pedro Sánchez, c’est au tour du ministre de la Santé, Carmen Montón, d’être inquiétée. Cette fois ce n’est pas une histoire de gros sous mais de « qualification » qui fait défaut. En effet, la ministre aurait obtenu de manière frauduleuse son Master interdisciplinaire sur le genre de l’Université Roi Juan Carlos de Madrid. La ministre démissionne le lendemain dans la soirée et est remplacée dans la foulée.

Ces deux affaires célèbres sont des images saisissantes montrant que la politique nouvelle voulue par Pedro Sánchez ressemble terriblement à l’ancienne dont il souhaitait s’écarter. Pour autant, malgré ces déconvenues, la politique économique de Sanchez semblait, elle, porter ses fruits.

 

Une politique économique viable un temps

Pedro Sánchez a, dès le début de son mandat à la présidence du gouvernement,  augmenté les dépenses de l’État afin de lutter contre l’austérité et le chômage. La dette publique et le chômage, par la suite, baissent de manière nette et indéniable. Le produit intérieur brut augmente quant à lui en 2018 pour atteindre 2,6 %. Pour autant en 2019 ce même produit intérieur brut chute et retombe à 2 %. La crise du coronavirus, en plus d’être un désastre humain en Espagne, entraîne un appauvrissement important de la population espagnole. Le gouvernement Sanchez fit passer une loi interdisant le licenciement et mit en parallèle un « revenu minimum vital ». La pauvreté semble acquérir ainsi une valeur légale.

 

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A la suite du confinement, des dons monétaires massifs sont répandus en Espagne pour panser l’économie. Mais cette manière de faire ne peut pas durer indéfiniment.  Comme l’affirmait Margaret Thatcher « Le problème avec le socialisme c’est qu’on arrive vite à court d’argent des autres ». Nous ne pouvons dès lors que nous demander : qu’arrivera-t-il lorsque l’État espagnol ne pourra plus fournir d’argent ? Le gouvernement ne semble pas vouloir oser se poser la question et préfère se cacher derrière les chimères d’un passé révolu.

 

La politique du bouc émissaire

Face à ces quelques exemples d’une liste significative d’échecs politiques, Pedro Sánchez se voit dans l’obligation de trouver un bouc émissaire ; une personne détestable qui rendra sa politique invisible face à la haine que cette personnalité générera. La France a le spectre hitlérien, l’Espagne le mort-vivant franquiste. Après ses premiers échecs politiques et des réélections plus ou moins difficiles le gouvernement espagnol mit en œuvre l’exhumation du corps du Caudillo. Tradition de la gauche espagnole que de déterrer des cadavres, celui-ci fut exhumé 24 octobre 2019 au mépris des profondes tensions identitaires que provoque cette décision. Après cet acte, le fantôme de Franco semblait avoir définitivement disparu des esprits. Le bouc émissaire aussi.

 

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Mais après la gestion désastreuse de la crise du coronavirus Pedro Sánchez devait se faire oublier. La génération d’un autre conflit tout aussi fantasque et symbolique que le dernier apparut dans son esprit. Cette fois Pedro Sánchez est déterminé à supprimer les titres nobiliaires donnés sous la dictature franquiste. Enlever des médailles, voilà une ambition bien étrange dans un pays où le chômage réapparaît aussi vite qu’il avait disparu et où les fractures sociétales se multiplient. Avec cette affaire des titres l’ombre fasciste réapparaît et celle du gouvernement disparaît dans un tour de passe-passe déjà trop usité. La mémoire est devenue le nouvel instrument politique à la mode. Elle permet de faire peur et d’agiter les foules sur un passé douloureux afin que celui qui invoque ladite mémoire puisse préserver son siège. Le spiritisme, voilà la politique de ceux qui n’en n’ont pas.

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