Le 2 juillet 1959, la Banque de France édite un billet de 500 francs à l'effigie de Molière.

Malgré les célébrations autour du 400e anniversaire de Molière, le gouvernement français refuse de faire entrer le dramaturge au Panthéon sous prétexte qu’il soit antérieur à la Révolution. L’écrivain et historien Raphaël Lahlou revient sur cette décision de l’exécutif.

 

« N’entre pas, Poquelin ! » … Exit Molière du Panthéon. Dont acte. Admettons avec Brassens et d’autres qu’il y fasse trop froid. Mais le limiter aux personnalités dites des Lumières ou au-delà jusqu’aux quinquets maigrelets d’aujourd’hui, c’est ridicule, hypocrite et au moins aussi faux-jeton que la nature exacte d’un personnage bien connu : le Tartuffe … de Molière. Quand une République en déclin érige en vertu cardinale l’amateurisme ridicule de son gouvernement, on se dit qu’elle ne sait plus guère ce qu’elle entend incarner et représenter. 

 

Un gouvernement de Tartuffes

Quand l’amateurisme devient fallacieux et non plus joli et naïf, il se fait impardonnable, et quand il se vante et se vautre dans l’inculture et l’ignorance historique à ce point, il se confirme comme tel. Il condamne toute l’administration gouvernementale qui passe pour une institution sotte et tatillonne, reine du mauvais brouillon, du bâillon et du bouillon fatal contre toute aspiration populaire. Quand cet amateurisme hystérique ne veut plus rien d’autre que de se simplifier jusqu’à ne défendre que l’amorphe Etat vicié limité à ses bureaux, l’Etat désormais factice et froid qu’il sert voracement en « parvenu scandaleux », se montre illégitime autant que ridicule. Il le fait, hélas, il est vrai, sans de francs grands risques, en hypocrite, en imposteur, en tartuffe !

Et c’est exactement ce que Molière dénonçait avec verve, implacablement, prophétiquement et lucidement. Ce qu’au fond, l’Etat amateur si actuel, masqué ou non, ne saurait ni pardonner ni accueillir, ni admettre, ni accepter même d’entendre ou d’écouter ! L’affaire est grave, en termes de philosophie et de pratique politique. Quand la nature et la puissance ultimes et bouffies de cet amateurisme de doctrine sèche ne s’exprime plus mais se réduit ou prétend nous réduire aussi à servir, avec une logique esclavagiste aussi datée qu’étonnante, ou veut obliger « le bon peuple à tondre » à servir, et que cet amateurisme furieux ne recourt plus qu’à une volonté affirmée, approximative pourtant mais sauvage, virulente, possessive, capricieuse et enfantine mais mal inspirée au fait (« parce que c’est « son » projet » !, et non pas : « le nôtre » !, le ton était déjà donné, certes), quand la folie publique n’est plus réduite qu’à cela, prenons la conclusion qui est juste: l’ensemble de tout cela ne mérite définitivement et décidément : aucun respect.

 

Un mépris de l’histoire

Les personnalités de la Cinquième République étaient plus cultivées et assumaient au travers des billets de banques leur attachement à la culture française mondialement reconnue. Elles étaient moins forcenées dans la platitude idéologique ! Il est vrai que nos billets actuels, peu francs et fort aisés à chiffonner, n’osent plus afficher de belles figures, et probablement pas : Molière, Racine, Corneille, Pascal. Pas plus que Montesquieu ni Bonaparte… Les petits papiers sont au présent sans grande valeur et sans aucun charme ! Pour le reste : rideau ! La morale ou la moralité de tout cela n’est hélas pas chez La Fontaine (absent de tout, lui aussi, pour les décideurs du jour): « Quand j’entends le mot : culture, je ferme le Panthéon… Et je froisse mon billet de banque ! »

En d’autres termes: nous n’avons pas besoin du « wokisme » ni de la « cancel culture », ces contradictions évidentes, ces deux impostures venues de loin. Nous avons déjà tout l’amateurisme débilitant et doctrinal autant qu’inculte du gouvernement et tout le pouvoir actuel pour réussir dans le ridicule, le mépris de l’Histoire, l’inculture idolâtre et la logique prétendue, bâtarde et curieuse dans l’excès et l’abus. Celle-là même qui suffit pour tout démolir dans notre pays, manie active et dynamiteuse par elle-même ! Hélas.

 


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