Affaire Epstein – Ghislaine Maxwell, un procès qui n’intéressait pas les médias
Publié le 14/01/2022
Alors que l’affaire Epstein a fait couler beaucoup d’encre dans la presse française, la condamnation récente de Ghislaine Maxwell n’a pas trouvé le même écho dans les médias.
Le début de la fin advint en juillet 2019. Jeffrey Epstein était arrêté pour trafic sexuel de mineurs. Homme d’affaires et ami des plus fortunés, personnage à l’apparence joviale et charmante, Jeffrey Epstein se révélait être en réalité un monstre froid et assez intelligent pour faire de son penchant criminel une activité lucrative. Pédocriminel devant l’Éternel, cet homme profitait de la proximité que lui conférait son argent auprès des mineurs afin de filmer nombre d’ébats entre ces mineurs et des personnalités puissantes dans le but de les faire chanter et d’améliorer encore sa situation. Toutefois, toute étoile, même funeste, finit par chuter. Et sa chute entraînera, lentement mais sûrement, celle de ses complices, en premier lieu Ghislaine Maxwell.
Qui est Ghislaine Maxwell ?
Née à Maisons-Laffitte dans les Yvelines, Ghislaine Maxwell est la fille du patron de presse britannique Robert Maxwell aux activités troubles (et à la mort tout aussi trouble). De nationalité franco-britannique et américaine (depuis 2002), Ghislaine Maxwell est femme d’affaires de profession et une mondaine de renom fréquentant avec assiduité les salons des plus grandes capitales occidentales. Petite amie de Jeffrey Epstein elle fut aussi la complice de ses crimes les plus immondes. Après plusieurs mois de « cavale », elle fut arrêtée le 02 juillet 2020 dans sa résidence du New Hampshire puis incarcérée au Metropolitan Detention Center de New York City, là-même où Jeffrey Epstein s’est « suicidé » le 10 août 2019.
A-t-elle été condamnée ?
Après un certain temps passé derrière les barreaux, Ghislaine Maxwell fut invitée à prendre place derrière la barre. Mise en accusation par six fois, les jurés la condamnèrent pour cinq de ces chefs d’inculpation, dont le plus terrible, celui de trafic de mineurs. Durant le procès, des victimes racontèrent le rôle d’entremetteuse de Ghislaine Maxwell et les pressions exercées par cette dernière contre de très jeunes filles sans le sou afin d’obtenir de leur part des attouchements sexuels pour son amant. Décrite comme étant une « prédatrice sophistiquée » par l’accusation, Ghislaine Maxwell clame toujours, avec ses avocats, son innocence, bien que les preuves soient accablantes et les témoignages des victimes inattaquables. Une procédure d’appel est déjà en cours. Les avocats de Ghislaine Maxwell tentent pour leur part de décrédibiliser le choix du jury dans son ensemble en soulevant le fait qu’un des jurés fut victime naguère de violences sexuelles. Toutefois l’argumentation peine à convaincre, les pièces à charge ne se trouvant pas invalidées dans une telle circonstance. Modalité propre au système américain, la justice américaine tente par un système de marchandage de faire accepter à Ghislaine Maxwell sa peine de réclusion criminelle en contrepartie d’un non-lieu pour les infractions de parjure commises par l’accusée et pouvant alourdir sa peine. La justice américaine pense en effet pouvoir par ce moyen apporter un peu de paix aux victimes en leur évitant un nouveau procès tout en permettant à la Justice d’être, un peu, rendue.
Pour ceux que le sordide intéresserait un ouvrage de trois journalistes d’investigation a été traduit en français à ce sujet et entre dans les détails de l’affaire Epstein et de son réseau d’influence tout en traitant le cas Ghislaine Maxwell de manière plus approfondie (L’affaire Epstein, Éditions Le jardin des Livres).
En quoi cela nous concerne ?
Ceci dit, il convient de constater quelque chose. Cette simple information que fut le procès de Ghislaine Maxwell et la condamnation qui lui est assortie a semblé passer au-dessus de la tête de nos médias. En effet mis à part quelques articles discrets de quelques dizaines de lignes, imprécis, la sphère médiatique française n’a pas su traiter à sa juste valeur une information capitale pour la population française. Alors que Ghislaine Maxwell était française, rabatteuse du plus grand pédocriminel de ce début de siècle, que son amant avait un appartement à Paris où il se livrait à ses abominations, et que ces deux sombres personnages étaient en lien avec un certain Jean-Luc Brunel, Français ayant « livré » à Epstein, pour son anniversaire, trois mineures françaises, les médias n’ont pas cru bon d’enquêter, ni du moins d’informer le plus simplement du monde les citoyens français. Alors que l’affaire défraye la chronique au Royaume-Uni (du fait des liens liant le Prince Andrew, fils de la Reine Élisabeth II, à Jeffrey Epstein) et aux Etats-Unis d’Amérique, lieu du procès, la France médiatique préfère noyer la population jusqu’à plus soif dans les élucubrations relatives au Covid-19.
Il convient, finalement, de se demander pourquoi les médias français n’ont pas, même l’espace d’une minute, interrompu un feuilleton de deux ans afin de parler du pire scandale pédocriminel de ce siècle ? Question qui restera certainement sans réponse mais dont la simple énonciation nous fait ressentir le drame de ce qu’est devenue la presse dite d’investigation en ce début de siècle.
« Il faut que la presse paraisse, surtout pas qu’elle paresse ! » affirmait Claude Frisoni et nous ne pouvons que lui donner raison.
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