Un collectif d'historiens veut corriger les erreurs du candidat Éric Zemmour.

Dans un « tract » publié aux éditions Gallimard un collectif d’historiens s’en est pris à la vision historique d’Eric Zemmour en multipliant les approximations, les mensonges éhontés et les remarques crasses. Parmi les réappropriations historiques présentes au sein de l’ouvrage « Zemmour contre l’histoire » nous avons pu y lire un article édifiant traitant de la question du «génocide» vendéen qui est ici totalement nié.

 

Il est des sujets dont on ne se moque pas impunément. Le « génocide » vendéen en fait partie. En effet, alors que le candidat à l’élection présidentielle affirmait dans son livre Destin français que « La guerre laiss[a] la place au génocide » en Vendée et que les révolutionnaires voulaient « remplacer lesfanatiques vendéens’ » afin de changer « l’humanité ancienne par une humanité nouvelle » un historien a cru bon de nier jusqu’à l’existence même du génocide. Le tout de manière anonyme, d’ailleurs comme l’intégralité des auteurs du dit « tract », courageux mais pas téméraires.

 

Un travail de « réinformation »

Le texte se voulant un écrit universitaire de réinformation fait en tout et pour tout deux pages en enlevant la citation préliminaire d’Eric Zemmour. S’en suit un long paragraphe hors-sujet parlant de l’amitié du candidat Zemmour avec le vendéen Philippe de Villiers, fondateur d’un « haut lieu de commémoration contre-révolutionnaire des guerres de Vendée ». Pour finir, ce paragraphe érige le travail de l’historien Reynald Secher, spécialiste international des guerres vendéennes, au stade de thèse en niant la notion de « génocide vendéen » que ce dernier défend. Reprenons donc les arguments exposés afin de dénier au massacre des vendéens ce caractère génocidaire.

D’une part est exposé un argument temporel portant sur la naissance de l’expression de « génocide », dénié par l’auteur lui-même et donc inopérant. D’autre part se cumulent des éléments véritablement critiques mais factuellement faux. L’auteur nous dit « qu’un génocide suppose une intention d’extermination d’une population définie » et affirme qu’il « n’existait pas avant (ni pendant) la Révolution d’identité régionale capable de cristalliser un projet ciblé d’éradication ». L’ « identité vendéenne » était donc « mythifiée » a posteriori et les vendéens n’auraient jamais formé « un groupe national, ethnique ou religieux ».

Notons déjà que la notion de génocide ainsi définie est imparfaite sur le plan juridique, seul cadre capable de définir une telle notion et de la sanctionner. Le Code pénal français précise en effet dans son article 211-1 que : « Constitue un génocide le fait, en exécution d’un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d’un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire, de commettre ou de faire commettre, à l’encontre de membres de ce groupe, l’un des actes suivants : atteinte volontaire à la vie ; atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique ; soumission à des conditions d’existence de nature à entraîner la destruction totale ou partielle du groupe ; mesures visant à entraver les naissances ; transfert forcé d’enfants. »

 

Une volonté destructrice

Ainsi sans être un groupe national, ethnique ou religieux, le génocide vendéen peut trouver sa source d’existence dans la volonté de destruction totale ou partielle « d’un groupe déterminé à partir de tout […] critère arbitraire », ici le refus de se soumettre à la République et à ses dirigeants. Nous pouvons ajouter à cela pour être précis que dénier le caractère national de l’identité vendéenne est historiquement faux. S’il est dit qu’il « n’existait pas avant (ni pendant) la Révolution d’identité régionale » vendéenne c’est oublier vite que les rois de France s’adressaient à « leurs peuples » et non à une entité nationale française. C’est aussi oublier que c’est spécifiquement la Révolution qui a contribué à fonder une identité vendéenne propre au sein de la province du Poitou en mettant en place des persécutions. Les vendéens s’allieront pour former une entité cohérente au sein de la France en brandissant notamment son symbole : le Sacré-Cœur du Christ entrelacés avec le Cœur Immaculé de Marie, symbole de la résistance vendéenne, toujours présent en tant qu’emblème de la Vendée.

Par la suite il est question de la matérialité du génocide. Celle-ci est remise en cause du fait de l’absence, selon l’auteur, d’une « doctrine systématique sur la question vendéenne ». La répression ne fut donc, selon lui, « jamais circonscrit[e] à un territoire précis » et les autorités révolutionnaires « se gardaient de traiter les ‘Vendéens’ comme un bloc hostile à la République ». La République ne faisait donc que chasser les « brigands ». La violence était en somme selon lui « désordonnée et aléatoire, soumise au hasard de la personnalité des officiers » et « bien loin de manifester la planification méthodique propre aux génocides ». L’élément matériel du génocide qui se traduit par l’ « exécution d’un plan concerté » est donc nié.

Mais c’était omettre la loi dite « d’extermination » du 1er octobre 1793 s’adressant aux « Soldats de la liberté » et déclarant la nécessité « que les brigands de la Vendée soient exterminés avant la fin du mois d’octobre ». Là encore est employé le terme « brigands », assimilé par l’auteur à la conception d’Ancien Régime que pouvait couvrir le terme, à savoir des pillards et autres bandits de grands chemins. Un terme, en somme, absolument banal, si l’on écoute notre cher historien, et qualifiant des criminels. Mais cette définition du terme « brigands » ne peut être acceptée qu’en dehors de tout contexte légal et historique. En effet, le travail parlementaire acté au même moment donne une définition précise du terme « brigands » vu par les révolutionnaires. La présentation du rapport du révolutionnaire Barère, commandée par le Comité de salut public, et intervenue le jour même du vote de la loi d’extermination est en effet éloquente. Barère assimile dans son discours « brigandages et les complots de ces royalistes » et exprime sa ferme intention de faire la guerre à « une armée catholique royale », excluant de ce fait une définition purement criminologique du terme « brigands » mais y ajoutant bien un caractère politique. Le massacre des Lucs-sur-Boulogne est d’ailleurs là pour attester de cette réalité. Pas moins de 127 enfants de moins de dix ans furent mis à mort sans compter les femmes, hommes et vieillards tués, portant le nombre de morts à au moins 459 personnes.

 

Un territoire précis

Ainsi, comme nous avons pu le voir plus tôt le territoire de la répression était, dans ce cadre de l’extermination, bien circonscrit à un territoire précis qu’est la Vendée et sur une population déterminée. La définition suivante : « Constitue un génocide le fait, en exécution d’un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d’un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire » ne peut donc qu’être favorablement accueillie. La question du génocide vendéen n’est pas une question juridique ou historique mais exclusivement une question politique. C’est d’ailleurs ce que nous avons pu observer à la fin du tract.

En effet, pour conclure son article, l’historien a fini par dire qu’Eric Zemmour a « instrumentalis[é] les cadavres des Vendéens » et a fait un parallèle plutôt audacieux avec la notion de « grand remplacement » du penseur Renaud Camus. Il affirme ainsi que la défense de la mémoire de la Vendée revient dans la bouche du candidat à la présidentielle à « réintroduire en sous-main ses obsessions racistes ».

Au final, ce tract ne fut qu’une entreprise maladroite et malaisée de nier l’existence de cette période afin de remettre en cause une pensée contemporaine qui déplaît. Saint-Just incitait à ne pas laisser de liberté aux ennemis de la liberté ; ses descendants continuent son œuvre avec un respect absolu et un zèle dans le chimérisme intellectuel à ce stade inégalé. 

« Une idéologie est précisément ce que son nom indique: elle est la logique d’une idée: L’émancipation de la pensée à l’égard de l’expérience. » Hannah Arendt, Les Origines du totalitarisme

 


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