Selon l’Institut national d’études démographiques (INED), les binationaux représentaient environ 3,3 millions de personnes soit 5% de la population française en 2008. Image d'illustration

Le général Henri Roure, officier des troupes de Marine revient sur la politique d’accès à la nationalité française, évoquant les conséquences sur la cohésion sociale.

 

Les journalistes, tous médias confondus, ont constaté récemment avec un brin d’admiration pour certains, que 4 000 « Français » se battaient dans l’armée israélienne. Ce chiffre interroge autant que l’idée implicite d’un appui de la France à Israël que le ton laissait imaginer. Certains commentateurs déduisaient dans la présence de ces jeunes au combat un soutien non-avoué de la France à Israël, ce qui évidemment s’avérait discutable. Dans leurs observations, s’ajoutaient à ces effectifs de plusieurs régiments d’infanterie, des otages « français » aux mains des terroristes du Hamas. Ils déploraient aussi l’assassinat de « Français » lors du massacre du 7 octobre. Ce qui m’est apparu aussitôt, sous le voile des mots, était une réalité à la fois triste et choquante, conséquence du discrédit de notre Droit et du délabrement de notre État.

Ces jeunes garçons et filles sont évidemment des bi-nationaux. Il s’agit en fait d’Israéliens, serviteurs de l’État hébreux, ayant conservé pour des raisons diverses mais surtout d’intérêt personnel, une deuxième nationalité, la nationalité française. La loi les y autorise. Fait bien étrange au demeurant où certains peuvent pleinement servir le pays auquel ils se sentent attachés affectivement et philosophiquement au risque de se faire tuer et profiter des avantages offerts par un autre dont ils détiennent aussi des documents d’identité. Il est sûrement plus aisé de se balader dans certains lieux du monde avec un passeport français plutôt qu’avec un passeport israélien. Mais surtout la France offre des avantages qui n’existent pas ailleurs. Que des Israéliens se battent pour leur patrie est pleinement digne et légitime. Risquer sa vie pour ceux qu’on aime est évidemment un engagement éminemment respectable. Mais nos journalistes et commentateurs occultent sciemment l’aspect très terre-à-terre d’une deuxième nationalité.

 

Une longue tradition

Ce système peut faire ainsi cohabiter sous un toit commun, le nôtre, des Marocains, des Algériens, des Syriens, des Maliens… musulmans convaincus, et des Israéliens eux aussi imprégnés de leur religion. Les choix de chacun éclairant l’une ou l’autre des adhésions religieuses. Curieusement les uns, venus de l’étranger conservent leur nationalité d’origine et bénéficient de notre nationalité, alors que les autres, pourtant totalement français, partent vers une autre nationalité mais prennent soin de conserver la nationalité française.

 

LIRE AUSSI → Israël – Gaza : le massacre des Innocents

 

La bi-nationalité résulte d’une longue tradition commune avec le Royaume-Uni. Elle est désormais suivie par d’autres pays. Toutefois cette règle est loin d’être universelle. L’Allemagne quant à elle demeure très réservée sur le sujet. Certains récusent cette possibilité ou la limitent comme l’Espagne, les Pays-Bas, l’Estonie, la Bosnie, l’Autriche, le Danemark, la Chine, la Norvège, la Belgique, la Bulgarie et bien d’autres États souverains.

L’usage ne posait pas de problème tant que les bi-nationaux, extrêmement minoritaires, connaissaient dans le pays d’origine et le pays d’accueil le même fond religieux et de civilisation. Les Allemands restés en Alsace-Moselle, après la libération de cette terre en 1918, ont pu sans aucune difficulté obtenir la nationalité française tout en conservant la nationalité allemande. Dans le même esprit, les Britanniques installés en France peuvent acquérir la nationalité française tout en demeurant sujets dans leur pays d’origine. Le partage d’une civilisation et d’une religion autorise ce double lien.

 

Une réalité complexe

Aujourd’hui, les conditions ont fondamentalement changé. Il ne s’agit plus d’une minorité, mais d’un nombre considérable de personnes revendiquant une double appartenance. En 2008, les binationaux représentaient 3,3 millions de français d’après l’Institut national d’études démographiques (INED) dont une grande partie provient du Maghreb et de la Turquie (essentiellement musulmans). Des chiffres qui ont dû fortement augmenter depuis 15 ans. Il semble donc irréaliste de nier que la double nationalité s’inscrit aujourd’hui dans les questions plus globales d’immigration et d’assimilation.

 

LIRE AUSSI → ENTRETIEN – Éric Denécé : «Le Hamas a endormi les Israéliens»

 

Un citoyen français peut conserver sa nationalité tout en optant pour une nationalité étrangère. C’est le cas de ces combattants israéliens. Il en va de même pour les descendants d’étrangers nés en France qui deviennent français à leur majorité, mais peuvent conserver leur nationalité d’origine à cette occasion. La France serait donc attirante pour les uns et insuffisamment séduisante pour d’autres qui la quittent mais avec précaution. Notre pays reçoit des regards contradictoires. Il offre un formidable attrait économique pour certains et subit un déficit d’amour pour d’autres qui lui préfèrent un autre pays.

 

« La nationalité est un idéal »

La nationalité française est ainsi ravalée au niveau basique d’un statut simplement utilitaire. Elle n’est plus pour tous le témoignage orgueilleux d’une appartenance à un peuple fraternel et grand. Elle n’est plus le résultat d’une collective acceptation d’une histoire, d’une langue et d’une vision. C’est une flétrissure qui devient celle de tout notre pays. Alors que notre Nation doit lutter contre le communautarisme et l’incitation à la désagrégation sociale, le maintien de la possibilité de double nationalité aggrave les risques encourus. La conservation pour des masses d’une règle réservée à l’origine à quelques individus se révèle comme le signe éloquent d’une désinvolture ou d’une indifférence des gouvernements.

Nous pouvons y déceler une atteinte à la nature profonde et sacrée de l’appartenance à la Nation. D’une certaine manière, il s’agit de la négation de l’absolu national par l’acceptation du partage de ressortissants avec d’autres pays pour la plupart moins établis dans l’histoire. Nous pouvons également y voir une influence néfaste des partisans d’une Europe-État où les nations s’effaceraient pour laisser la place à un peuple théorique gouverné par des apatrides dévoués à une vision méprisante des hommes mal nés. La nationalité leur importe peu, ou pire les gêne, car ils font leurs dévotions à des organisations internationales dont le coeur cependant bat outre-Atlantique.

 

LIRE AUSSI → Mossad, Shabak, Aman : comment Israël s’est fait piéger et enfumer

 

Pour l’Homme, la nationalité se trouve intimement liée à la citoyenneté. C’est évidemment là que le bât blesse. La citoyenneté est un engagement, en cela elle est un idéal. Elle ne se révèle que dans le sentiment d’appartenance à une même communauté. Elle invite à une participation active à la vie publique et politique. Elle doit se concevoir comme un échange entre l’État et le citoyen au travers d’un éventail de devoirs envers la Nation et de droits individuels et collectifs, dont le droit de vote, garantis par l’État. Il y a là un rapport intangible…

La citoyenneté ne s’exprime parfaitement que dans l’amour de la Patrie qui lui donne son sens profond en ajoutant l’idée d’un éventuel sacrifice. Il est impossible de demander à quelqu’un qui fraie avec un autre État cette entière adhésion à la relation intime entre l’État français et le citoyen.

 

Une vision humaniste

Je ne peux m’empêcher de faire une comparaison entre la situation que nous vivons et celle que les populations des colonies connaissaient. Depuis le début de la colonisation, la France avait tenté l’assimilation; déjà! Elle poursuivait une volonté humaniste que certains aujourd’hui tentent honteusement de taire. Elle consistait à offrir les avantages d’un peuple de haute civilisation à des populations simples et exploitées par les potentats locaux. Ainsi, par un senatus consulte du 14 juillet 1865, Napoléon III avait offert la citoyenneté française à tous les autochtones d’Algérie qui la demanderaient. La population indigène, sans doute encore trop fruste, mais surtout très influencée par les cadis, n’en avait pas voulu.

 

LIRE AUSSI → Le «vouvoiement» : histoire d’un panache français

 

Elle voulait continuer à être régie uniquement par le statut personnel coranique. Il est vrai que le rapport préparatoire insistait sur des obligations liées à la citoyenneté française: « Ainsi, la religion musulmane autorise la polygamie, la répudiation, le divorce. Il en est de même de la religion juive. Il est bien entendu que l’exercice de tels droits sera interdit à l’indigène devenu citoyen français ». Seuls les juifs accédèrent aux avantages de la nationalité française par le décret Crémieux qui attribua d’office, en 1870, la citoyenneté française aux « Israélites indigènes» d’Algérie, c’est-à-dire aux 37 000 « juifs », du territoire.

Ils rejoignirent ainsi leurs coreligionnaires de métropole pleinement français depuis Napoléon. Ils durent cependant abandonner la loi mosaïque. Le choix pour les musulmans est resté possible après 1945. Ce furent les ordonnances du 15 novembre 1958 qui octroyèrent, sans réticence, à tous les habitants d’Algérie, le bénéfice de la nationalité française. Le contexte était favorable. Aujourd’hui, les immigrés musulmans acceptent les avantages de la nationalité française, mais veulent vivre sous des règles musulmanes, ce qui n’est pas sans impact sur les Français « originels ». Nous en sommes revenus, cette fois sur le territoire anciennement métropolitain, à la difficulté d’approche statutaire entre musulmans et non-musulmans, à l’origine de ce qui s’était appelé le double collège.

 

La nécessité de rupture

Il faut donc impérativement revenir sur cette rupture entre nationalité et citoyenneté. La nationalité française ne peut être obtenue, quand il s’agit d’étrangers ou d’enfants d’étrangers, par le simple fait de naître sur notre sol. Elle est un héritage qui doit être accepté et assumé ou faire l’objet d’une demande étayée, contrôlée et se recevoir par étapes. Cette question est loin d’être accessoire. La réponse apportée sera déterminante pour l’équilibre, la nature et l’avenir de notre pays dans l’indépendance, la sécurité et la prospérité. Les mesures à prendre sont simples. En priorité, remplacer le droit du sol par celui du sang. Cette mesure s’impose. Ensuite récuser le principe de la double nationalité qui amènera à exiger un choix pour tous ceux qui bénéficient présentement d’une double nationalité.

 

LIRE AUSSI → Déclin français : jusqu’où va-t-on encore descendre ?

 

Les moyens de vérification actuels pourront éviter les tentatives de fraude. Bien sûr, de rares exceptions seront admises pour les originaires des pays partageant avec la France une proximité culturelle et un ensemble de valeurs philosophiques, morales et politiques. Simultanément, il deviendra impératif de mettre en oeuvre la déchéance de nationalité pour ceux qui voudraient acquérir une nationalité étrangère ou refuseraient d’abandonner leur autre nationalité. Nous savons déjà que les Marocains et les Israéliens ne peuvent pas juridiquement renoncer à leur nationalité. Cette déchéance devra s’étendre à tous ceux de seule nationalité française qui se montreraient hostiles à notre Nation et s’engageraient dans des entreprises terroristes.

Il est vraisemblable que des conflits d’allégeance se révèleront. Ils seront reçus comme des moyens d’assainir une situation qui perturbe la Nation. Ce laxisme à l’égard de la nationalité et de la citoyenneté, se situe dans le même registre que l’abolition des frontières, l’abandon de notre souveraineté au profit d’une organisation dirigée par des personnages non-élus. Il s’ajoute à la dislocation de l’Éducation Nationale, au ralliement à la pensée philosophique, militaire, financière et économique mondiale, au sabotage de la culture et de la langue françaises, à l’insécurité venue de l’extérieur, au droit de vote et d’éligibilité concédé aux étrangers de l’Union Européenne pour les élections locales… et couronnant le tout à la dépossession du citoyen de son rôle politique par des gouvernants convaincus de leur supériorité sur le peuple.

Cette élégance concédée à quelques uns s’est transformée avec la masse migratoire en une arme redoutable s’ajoutant à la panoplie des mondialistes. Elle participe à la destruction de la démocratie et à l’anéantissement programmé de notre Nation.

 


Vous avez apprécié l’article ? Aidez-nous en faisant un don ou en adhérant

Laisser un commentaire

RSS
YouTube
LinkedIn
LinkedIn
Share
Instagram

Merci pour votre abonnement !

Il y a eu une erreur en essayant d’envoyer votre demande. Veuillez essayer à nouveau.